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Les noms des lieux habités Fougerollais

Les noms des lieux habités Fougerollais

          Il y a sur le territoire communal environ 140 noms de lieux habités . bourg, villages, fermes isolées. On aimerait connaître la signification de leurs noms par simple curiosité et pour savoir en plus sur le défrichement de la grande forêt primitive qui couvrait tout le territoire  aux époques très anciennes, et sur la mise en valeur de l'espace fougerollais. Les populations, se fixant peu à peu en des endroits précis après les défrichements, donnent des noms à leurs habitations. Ces noms sont pour nous un héritage. Ils font partie de notre patrimoine, même s'ils ne correspondent plus au paysage actuel. A quelle époque les premières fixations de populations sur notre territoire ont-elles eu lieu ? Sur quels sites ? Par quels moyens ? Par qui ? Les noms de lieux actuels nous donnent des réponses.

          Les origines et les dates des premières implantations de la population sur notre territoire :

 

          Les noms de lieux actuels (la racine des mots et leur terminaison) permette au spécialiste de déceler immédiatement à quel siècle ils ont étés formés, car chaque période de l'histoire a sa manière propre de former les noms de lieux. Le plus ancien sur notre territoire est Aubigné : il se placerait au début de l'ère chrétienne lors des premiers siècles. Aubigné selon les spécialistes proviendrait soit du nom latin Albinius, probablement le premier défricheur d'un petit secteur de la forêt primitive, soit du mot latin alba qui désigne la couleur blanche (rappelons que la conquête de la Gaule par les Romains se place au  premier siècle avant notre ère). De plus, la terminaison du nom (-gné) confirmerait la date très ancienne du mot Aubigné.

           Autre datation : un grand nombre de nos noms de lieux actuels se terminent par -ière, -erie, -ais, soit près de 40% des noms fougerollais, et sont tous composés de la même manière : pour racine, le nom de l'occupant ancien et pour terminaison, les suffixes énonvés ci-dessus. Ils datent tous du Moyen âge (Xème-XIV éme siècles). Une foid la paix retrouvée après les invasions germaniques et normandes, les grands défrichements de la forêt primitive et la mise en valeur du sol fougerollais commencent. On ne peut citer tous les noms tant ils sont nombreux : la Brodinière, la Brichetèere, l'Angotière, la Thomassière, la Lamberdière, la Mercerie, etc....

          Les textes anciens sont aussi une source de renseignement, d'autant plus qu'ils sont datés : titres de propriétés, actes de vente, textes émanant des seigneurs et surtout les textes des donations faites à l'Abbaye voisine de Savigny (créée en 1112)réunis dans sont Cartulaire. On peut ainsi par ces textes datés remonter jusqu'au Moyen Age. Mais ses textes, à l'origine écrits en latin par les copistes et les clercs médiévaux, ont parfois  été altérés au cours des siècles notamment les noms des lieux ( suppression de lettres ou de syllabes, mélange du latin et de l'ancien français). Certaines déformations étaient dues aussi à la transmission orale des noms d'un siècle à l'autre, par les populations locales qui parlaient patois. Ces noms déformés, légèrement différents des noms actuels, se trouvent donc dans les textes anciens, ce qui en complique l'interprétation. Quelques exemples : pour le XII éme siècle, Brollion de Landis ( Bridelande), Camachin (Chamossay),Marreium, Mereiolum, Merreicochet ( Méray)...... pour le XIII ème  siècle. Siligneio (Sillandre), Taboeria (La Tabuère)....

          Toutes ces données, datées, montrent bien que le grand défrichement primitif se situe au Moyen Age.

          La localisation des sites habités :

          Certains noms de lieux ruraux indiquent un trait physique qui a dû frapper les premiers occupants au point de l'insérer dans l'appellation des lieux qu'ils habitent.

          Le relief de Fougerolles est certes modéré. Les rivières, les ruisseaux ont un faible débit, les dénivellations sont modérés et les pentes faibles. Notons toutefois des allusions au relief dans les noms de lieux ; Le Creux, Courbefosses  ( la rivière formant là une courbe) Le Rocher ( avec un affleurement rocheux). Les Mottais, les Buttes qui dominent la vallée et permettent une vue assez ample, enfin les rois "monts", Montclair, en position légèrement dominante permettant de voir clairement l'environnement, Moncharaiy dont l'interprétation est plus délicate à cause de la racine "char", au sens de route, chemin, transport. Le Moncharet de la carte de Cassini (XVIIIéme) évoque un mauvais ou difficile charroi, lié peut-être & la pente, bien que faible. Quand à Montfland  (Montflaux, Montlaud), on ne saurait en donner une explication précise, Il y a aussi La Table : terrain plat, rocher plat,  pierre préhistorique qui aurait disparu ?

          Des noms peu fréquents évoquent l'eau. C'est le cas de la Source. Beaucoup plus surprenant est le nom de  l'Evay . Pour les spécialistes, il indique un lieu qui retiens l'eau, un lieu où l'on voit sourdre l'eau. Notons que le nom Evay, assez fréquent en Mayenne, désigne un petit cours d'eau, Evay proviendrait du mot latin aqua, muté en aigua, eve, d'où Evay Quant au mot Goué , laissons Maître Guy l'expliquer: le Goué ou gouet désigne une grosse serpe, et le gué permet de traverser une rivière en coupant le flot, comme le ferait la serpe du bucheron coupant le bois. La rivière de Goué fut-elle; à une certaine époque, perturbée dans l'écoulement de ses eaux par un gué ?

          Les noms de lieux descriptifs les plus nombreux concernent les végétaux, tels qu'ils ont été trouvés lors des premiers défrichements ou implantés par la suite. Le terme général d'abord : le Bois  au sud de la commune. Par ailleurs, le Bois Vert, création récente dont la couleur correspond aux conifères qui s'y trouvent. Pour la Gauterie certains voient en "gau" la désignation d'un bois, d'autres évoquent à son sujet"gast", espace dévasté, en mauvais état. Certains noms sont liés à des espèces végétales la Chênaie; l'Aulnaie ou Aunay plantée d'aulnes ou aunes, arbre des zones humides, la Boulaie, lieu planté de bouleaux, la Godefresne, qui fait songer aux frênes. Puis, il y a les noms de lieu qui rappellent des associations végétales moins hautes que la forêt : le Taillis qu'on coupait régulièrement en rapport avec les besoins en bois. C'est aussi le cas des landes, qu'il s'agisse  des landes incluses dans la forêt primitive sur des sols les plus pauvres, avec fougères, genêts, ajoncs, bruyères, ou bien des landes conservées après défrichement de la forêt pour les besoins de l'élevage ou le repos des terres cultivées (au XVIIIème siècle certaines fermes avaient la moitié de leurs terres en landes) , d'où les noms de lieux tels Fougerolles, les Landes, Blanche Landes, Bridelande, les Brières, la Bruyère. Des espèces végétales basses et particulières ont aussi donné leur nom aux  lieux   le Houx, la Bourdaine, arbuste dit aussi aune noir, dont l'écorce, en tisane, avait des vertus médicinales. Enfin signalons l'Epinay, entre la Dorée et Fougerolles, buisson d'épines implanté peut-être là pour délimiter et défendre les territoires respectifs ( l'épine fut plus tard remplacée par des bornes).

          Tous ces noms évoquent les paysages, mais montrent aussi, par leur diversité, la nécessité pour chaque occupant de différencier son habitation de celles des voisins.

          Lors de tous ces défrichements, réussites difficultés, échecs ? Le terme de " Belle Arrivée " n'est peut être pas seulement le fait d'arriver en un lieu précis, mais aussi, suivant un autre sens de ces mots, d'aboutir, de réussir son installation du premier coup, d'emblée ( qui, au Mayen Age signifiait " de belle arrivée ". Mais il y eut aussi des difficultés d'installation , des échecs. Le nom les Mézières provient de " maceriae " qui signifie ruines, preuve probable d'une implantation rurale ancienne tombée en désuètude, en ruine, mais suivie d'une remise en exploitation et, à ce moment-là dénommée " Mézières " à cause des ruines encore présentes. Le nom " Chalonge " vient du mot calumnia=procès, chicane en justice, accusation . On ignore la date et les causes du conflit. Aujourd'hui l'habitation n'existe plus et " chalonge " ne s'applique plus qu'aux parcelles environnantes.

          Citons aussi " Nichien " appelé parfois Nid-de chien. Pour certains, le nom évoquait peut-être un lieu où les chiens nombreux, se bagarraient. Pour d'autres, c'aurait été une terre ingrate, malaisée à cultiver, connotation (ce qui n'est plus le cas aujourd'hui). La gauterie serait dérivée non pas non pas d'un certain Gautier, mais de gault, gast désignant une terre misérable, une friche.

          Comme, il était essentiel de se défendre contre les animaux, les errants et même les voisins, des clôtures étaient nécessaires. D'où les noms Haie, Plessis, Clos. 

          Dans son sens le plus ancien, la haie était un espace, une surface délimitée et fermée par un rempart protecteur. Au milieu de la forêt, il faisait figure de réserve, parfois de garenne. De nouveaux venus s'installant dans ce lieu clos, ou à proximité immédiate, ont, pour désigner leur village nouveau, gardé le nom préexistant : La Haie, nom commun qui devient alors un nom propre, la Haie avec le sens nouveau de lieu habité. Puis, à partir de ce lieu, des haies linéaires (au sens commun : talus, "hâ") sont construites peu à peu autour des champs issus du défrichement environnant. La Haie qui désigne le village n'est donc pas à confondre avec les multiples haies qui cernaient les champs et qui, bien qu'éléments de protection, elles aussi, sont plus récentes et seulement linéaires.

          Le Plessis désigne, lui aussi un système de protection : plaisier, mot très ancien, signifiait ployer, entrelacer, tordre, entourer de haies entrelacées. La plaisse était une clôture formée d'arbres proches les uns des autres, plantés en ligne et dont les branches s'entrelaçaient, établissant ainsi un solide rempart végétal parfois renforcé par des ronces. Plaisse désignait aussi l'espace ainsi protégé, au point d'être considéré parfois comme un lieu fortifié et même un château. Nos deux Plessis fougerollais (le haut et le bas) sont, sur notre territoire, les seuls signalés par ce mode de clôture et des évènements les concernant se rattachent à notre histoire locale. Notons aussi que c'est au Plessis qu'a  été trouvée, au XIX ème siècle, une belle collection de monnaies anciennes. Bien que le Plessis ait été une exploitation agricole, il avait une place particulière dans l'histoire de Fougerolles.

          Quant au "Clos", au nom significatif, il n'est pas la simple "closerie" peu étendue et entourée de haies, où la simple parcelle proche de la maison d'habitation destinée aux plantes rares et fragiles à protéger et donc à clôturer, mais le centre d'une exploitation rurale, créé au XIXème siècle et protégé, lui aussi, par des haies et des talus.

          Certains noms de fermes évoquent aussi le défrichement de la forêt primitive. A ce sujet, au nom lourd de sens et ancien est celui de Loge, au nombre de 5 sur le cadastre de 1857. Des errants vivant de la chasse dans la grande forêt décident de se fixer, de défricher et de cultiver la terre. Ils s'installent dans des huttes sommaires couvertes de feuillage. Certaines furent temporaires, d'autres devinrent de véritables fermes habitées par le défricheur lui-même. Autres cas, "Loges" est parfois accompagné du nom d'une ferme. Un exemple; la "Loge de la Thomassière' prouvant que certains habitants de ce village avaient entrepris de nouveaux défrichements à proximité. Ces loges créées secondairement ont parfois disparu ou sont devenues des fermes à part entière, séparées de la ferme qui les a fait naître. 

          Autres cas, la création de villages. Un bon exemple est celui de la Goulgâtière. Un texte de 1254 atteste que trois frères Raoul, Etienne et Richard GOULEGAST 'leur nom de famille est un surnom qui signifie "bouche endommagée ou qui bave et qui désigne une anomalie du visage du père de ces trois frères ou d'un de leurs ancêtres installé en ce lieu). Ces trois n'habitaient probablement pas, chacun avec sa famille, sous le même toit. Trois fermes furent créées en ce lieu. Elles ont perduré jusqu'à nos jours, formant ainsi un village.

          Il y avait aussi les exploitations à proximité des châteaux gérées autrefois par les châtelains eux-mêmes mais surtout par les régisseurs. A Goué, en contre-bas, au pied du château, à proximité de son étang, de ces bois et taillis, de ses deux moulins se trouvait la "basse-cour" avec ses granges et ses étables. La Hautonnière, quant à elle, comprenait quatre maisons dont la ferme, un colombier, un étang, deux moulins. La demeure a été détruite au XVéme siècle, rebâtie et rasée sur l'ordre de Richelieu et le bâtiment qui a subsisté jusqu'au début du XXème siècle n'était que le logement de l'intendant. L'origine du nom Hautonnière est incertaine : Haut ? Le site ne correspond pas à un lieu élevé. Nom d'homme ? Trait de caractère du Seigneur ? Certains ont évoqué, peut être à cause du titre de Marquis que ces seigneurs avaient, la fierté, la grandeur et même l'arrogance. Quant à Méray ( fief vassal de la châtellenie de Pontmain), le nom a donné lieu à de multiples interprétations. Dans le cartulaire de Savigny (1114) on lit "Marreium, Merreiolum, Merreicochet" pour désigner les fermes de Méray, Merreiolum étant un diminutif de Marreium. On désignait aussi ce village par Meyré. Méré, Mereuil, Mairé... Certains, pour expliquer le nom Méray, ont pensé à un nom d'homme ( Matrius, Marius). D'autres rapprochent Mairé de marais : on est, en ce lieu, proche de l'étang de Pontpierre et s'y trouvaient des landes marécageuses, des terrains ingrats et très humides. D'autres enfin dérivent Mériel du gaulois "maro" ( grand) et "ialod" (clairière, établie ici au milieu de landes marécageuses). Quant à "Cochet", il signifie jeune coq et désignerait une exploitation anciennement liée à l'élevage des volailles ? Il désigne aussi le coq d'un clocher ou une girouette qui aurait peut-être surmonté un des bâtiments.

                                                                                                                                                                             Huguette FLATRES-MURY

Date de dernière mise à jour : 2023-11-09 11:21:37

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